Les échecs : jeu de guerre ou jeu de paix ?
Le jeu d’échecs est l’une des plus anciennes manifestations culturelles de l’humanité. Son origine n’est pas vraiment connue, mais tout le monde s’accorde à dire que c’est un jeu mythique et lointain né en Orient. Elle existe depuis plus de quinze siècles et a contribué à servir de pont entre l’Est et l’Ouest, ainsi qu’à combiner les aspects du sport, de l’art et de la pensée scientifique.
Bien que les échecs soient un art en soi, ils ont été liés dès le début à l’art de la guerre et aux vertus militaires. Le premier antécédent du jeu, le Chaturanga, était une représentation des 4 corps qui composaient l’armée hindoue et presque toutes les pièces du plateau aux échecs anciens et modernes, représentaient et représentent des armées avec leurs rois, généraux, cavalerie, pions, etc. L’art de la guerre, avec ses stratégies et ses tactiques, est également commun aux deux disciplines. La vérité est que l’origine des échecs est allée de pair avec les sociétés qui les ont inventés et pratiqués et ces sociétés étaient, essentiellement, des guerriers.
Pour approfondir vos connaissances, visitez cette page consacrée à l’art et l’histoire des échecs.
Que nous disent les écrits ?
Alfonso X « le Sage », Les livres, dés et échiquiers d’échecs de 1283, dans la présentation consacrée aux échecs, Alfonso X indique les types de personnes qui pourraient être plus intéressées à participer à ce genre de jeu qu’à « être vues » : les femmes, qui ne montent pas à cheval et sont enfermées ; les hommes qui sont vieux et faibles ; ceux qui « ont goûté à détourner leurs plaisirs » ; et les prisonniers, les marins et ceux qui, pour cause de maladie, sont empêchés d’exercer d’autres activités.
Tous ont pu trouver dans cette pratique une consolation à leur époque stérile, mais aussi un enseignement moral, car chaque pièce contient un sens et les façons de se déplacer sur le plateau montrent quels mouvements sont admis et quelle stratégie doit être employée. Suivre le jeu est un divertissement qui permet d’éviter les conflits et d’apprendre à surmonter les difficultés. Les jeux entre les califes et les rois médiévaux résolvaient parfois leurs conflits non pas par la guerre mais par une bataille d’échecs.
Il existe un courant de longue et ancienne tradition, qui considère les échecs comme une représentation symbolique de la structure hiérarchique d’un royaume, avec les différentes positions, dignités et offices qui le composent. Les légendes fondatrices archaïques lient souvent l’invention du jeu à l’éducation d’un prince. L’exemple classique est le Liber de moribus hominum et de officis nobilium, sive super ludum scachorum écrit par Jacques de Cessolis au début du 14ème siècle.
En outre, il faut aussi noter qu’aux échecs, un exemple est donné à tous les états de la république pour que chacun ait sa place et son exercice indiqués, sans occuper ceux de l’autre, puisque nous voyons que le pion marche comme un pion, petit à petit, en avant, sans revenir en arrière ; et l’ivoire comme l’ivoire, dans les coins, sans changer de couleur ; et le chevalier comme le chevalier, en travers ; et le roque comme le roque, droit ; et le roi comme le roi, sans pouvoir enfreindre cette loi.
Dans son premier traité, une habile fable était proposée pour relier la fonction de ce jeu à la correction des coutumes tyranniques d’un roi, tandis que le second était destiné à la description des pièces nobles, s’occupant des régiments particuliers des monarques, des conseillers (évêques), des chevaliers (chevaux) et des juges ou gouverneurs (roques). Ainsi, le troisième traité procédera à l’évaluation des offices populaires, en attribuant à chacun des huit pions des tâches ou des fonctions administratives différentes.
La nouveauté est d’un grand intérêt et s’inscrit dans l’iconographie des mois de l’année, gravée sur tant de portes d’églises et liée à des travaux essentiellement agricoles : plantation, récolte, chasse, garde et surveillance du bétail ou des arbres fruitiers. Une partie de ces caractéristiques et attributs seront utilisés dans cette merveilleuse représentation allégorique des tâches qui permettent au royaume d’être maintenu et prospère. Ce qui est unique, c’est que le nombre de pièces d’échecs augmente, car, bien qu’elles restent des pions et se déplacent selon leurs règles, en fait, chacune d’entre elles est différente et associée à la noble figure à laquelle elle est attachée. Les échecs deviennent alors un jeu dans lequel treize « trebejos » sont disposés : cinq nobles, plus huit qui agissent au service de ces pièces et de leurs besoins particuliers, comme indiqué par exemple pour décrire le pion h2 qui correspond au fermier et à l’agriculture.